Mondial de l'Automobile 2022 @ Paris, Porte de Versailles
Textes et photos par Valentin Bourgeois.
Après quatre années d'absence pour cause évidente de pandémie, le Mondial de l'Automobile marquait son grand retour en ce lundi 17 octobre 2022. Avec six jours d'ouverture prévus pour le public, une densité moins importante de stands mais surtout un centre d'essais sur place, le Mondial entendait se réinventer pour mieux correspondre aux enjeux actuels de l'automobile et sa transition vers la mobilité. Nous nous sommes rendus sur place pour avoir un aperçu du futur de l'automobile et essayer d'y trouver un peu de passion, voici notre reportage !
Première étape : les constructeurs français
Nous commençons donc ce compte rendu avec un peu de chauvinisme, j'en conviens. Les constructeurs français ont été parmi les premiers à répondre présents à ce mondial, historiquement incontournable pour le lancement de leurs nouveaux modèles. Premier constructeur sur la liste : Alpine, avec son stand bleu de France et ses modèles de plus en plus sportifs. Nous commençons avec de la passion automobile et ça nous plaît ! La marque dieppoise y présente son dernier bébé, l'A110 R qui part en chasse aux track toys allemands à grands coups d'appendices aérodynamiques et de carbone. La Berlinette conserve les 300 chevaux de la version S mais perd 34 kilos grâce à un régime drastique, composé de jantes spécifiques, de harnais six points, de lanières d'ouverture de porte et d'un peu moins d'insonorisation. Nul doute que l'efficacité déjà redoutable de l'A110 S doit en être multipliée, et bon nombre de ces voitures finiront sur un circuit ! Devant elle se trouve le concept 100% électrique A110 Eternité, qui nous ramène à la réalité des normes environnementales et de la fin du thermique. Enfin, une première mondiale se trouve sur le stand et c'est un concept qui brille : l'Alpenglow. Radical prototype qu'on croirait tout droit sorti d'un jeu vidéo, il préfigure une évolution prochaine du style Alpine en suggérant une autre technologie : l'hydrogène. Les caractéristiques techniques, elles, restent un secret pour le moment...
Restons dans le groupe Renault avec un concept Dacia que l'on croirait échappé d'un film post-apocalyptique : le Manifesto. Une Dacia sur Arts & Mécaniques, suis-je devenu fou ? Et bien non, car la marque inaugure ses nouveaux codes stylistiques au Mondial avec une gamme renouvelée mais surtout un buggy 100% électrique qu'on emmènerait bien dans les dunes ! Il ne préfigure pas un modèle de série mais une nouvelle approche du design automobile qui sera repris sur les prochains modèles de la gamme avec un motto : ne conserver que l'essentiel. C'est assez disruptif, à l'heure où les écrans ne font que grandir dans les habitacles...
Toujours dans le groupe Renault, c'est désormais chez la maison mère que nous nous rendons pour la conférence de presse matinale où une première mondiale est présentée par Luca De Meo : le Concept 4ever Trophy qui rend hommage à l'incontournable 4L ! Avant même que la housse soit retirée, nous devinions que le véhicule allait être bariolé, haut sur pattes avec une certaine inspiration offroad. Un hommage au 4L Trophy selon la marque, qui est très apprécié des étudiants et qui permet de faire perdurer la légende de la Renault 4. Ce concept nous donne une idée de ce à quoi pourrait ressembler la version finale qui sera un crossover électrique. Derrière elle se trouve la Renault 5 Turbo 3E que l'on a déjà découverte à Chantilly Arts & Elegance, puis le magnifique concept de la nouvelle Renault 5 ferme la marche de ce "Car Walk" fort sympathique. J'apprécie particulièrement l'approche du renouvellement de la gamme par le néo-rétro, d'autant plus que Renault montre une intention claire de revenir en WRC avec la R5 électrique en interpellant la FIA lors de la conférence de presse. Cela promet !
N'oublions pas la présence du joli Scénic Vision concept ou encore le Kangoo électrique "Hippie Caviar Motel" à l'intérieur décalé. Pas de doutes, Renault apprécie le mondial !
N'oublions pas la présence du joli Scénic Vision concept ou encore le Kangoo électrique "Hippie Caviar Motel" à l'intérieur décalé. Pas de doutes, Renault apprécie le mondial !
Continuons notre visite chez Stellantis où les marques françaises Peugeot et DS prennent une place importante. Alors que Citroën venait de présenter une étude de style, la marque était étonnamment absente du salon et c’est Jeep qui est venue renforcer la présence du groupe avec la première mondiale de l'Avenger, premier modèle électrique, plus petit que le Renegade. Chez la marque au lion, c'est le 408 qui fête sa première apparition publique avec une gigantesque sphère tournante, proposant d'apprécier les lignes du SUV Coupé. Pour ce qui est de la passion automobile, la 9X8 trône fièrement devant la 508 PSE avec une belle mise en avant du label Peugeot Sport. À quand plus de modèles ?
Continuons avec un moment d'histoire en ce lundi 17 octobre : la présentation du premier modèle d'un nouveau constructeur français ! Au milieu d'un stand plus qu'épuré se tenait une voiture, sous une housse, avec la seule inscription "World Premiere 9.50 AM". La marque ? Hopium, jusqu'alors inconnue au bataillon pour notre part. Et pourtant, un vainqueur des 24 heures du Mans, Olivier Lombard en est à la tête avec un projet ambitieux : une berline sportive à hydrogène, intégralement produite en France. Au moment où la housse noire est levée, nous découvrons une sublime berline dessinée autour d'une membrane, c'est ainsi qu'ils l'appellent, composée de plusieurs réservoirs à hydrogène dans le plancher et au centre du véhicule. La Hopium Machina Vision est désormais ouverte à la commande, et pour la première fois depuis longtemps : une voiture 100% française a été révélée au Mondial de Paris !
Toujours dans les nouveaux constructeurs français, NAMX présente un SUV coupé à hydrogène dessiné par Pininfarina, tandis que KG Auto présente La Bagnole, un "jouet rationnel" de 283 kilos qui peut embarquer jusqu'à 150 kilos de charge utile. Deux moteurs électriques sur le train arrière peuvent envoyer 480 Nm de couple, promettant de jolies balades en forêt !
Seconde étape : les constructeurs étrangers, avec une forte présence chinoise...
Après ce petit tour des constructeurs français, allons voir du côté des autres et commençons avec Great Wall Motors, le plus gros producteur de SUV chinois. La firme n'est pas présente officiellement mais plutôt indirectement avec deux marques : Ora et Wey. La première présente la Funky Cat, une citadine électrique néo-rétro qui rappelle une certaine Mini. Avec sa version GT qui reprend même les couleurs de la Mini Cooper Works GP, on se demande presque si l'on ne se trouve pas sur le stand de la marque anglo-germanique. Cette petite citadine promet une autonomie de 310 km WLTP pour aller chasser sur les terres de la Fiat 500e, avec un moteur électrique de 171 chevaux. Cela pourrait être sympa, mais le design de l'arrière du véhicule fait l'impasse sur des feux conventionnels, comme une impression d'un produit pas terminé. C'est dommage ! Le second modèle amené par Ora est la Next Cat (décidément, ils aiment les chats chez Ora) : une grande berline électrique dont le style semble clairement copié d'une certaine allemande sportive. L'intérieur est raffiné et de qualité, mais la ressemblance est tout de même flagrante... Du côté de Wey, les SUV hybride rechargeables Coffee 01 et 02 trônent fièrement sur le grand stand aux côtés des Ora. La promesse ? Un hybride rechargeable avec une autonomie de plus de 140 kilomètres en électrique et un équipement pléthorique (régulateur adaptatif, maintien dans la voie, caméras 360°, intérieur soigné...). Avec 476 chevaux combinés, le SUV sera proposé aux alentours des 50 000 € en France, ce qui devrait faire des heureux...
Le prochain constructeur que l'on va visiter est BYD (Build Your Dreams...) qui présente pas moins de trois voitures électriques à Paris et fête par la même occasion les premières livraisons européennes. Si vous avez ou avez eu un téléphone Samsung, Nokia ou Motorola, vous avez déjà utilisé leurs produits : BYD Company détient 65% du marché mondial des batteries nickel-cadomium. Alors qu'en est-il de leurs voitures ? Et bien, commençons avec la plus jolie à mon goût : je vous présente la berline Seal qui s'inscrit dans la lignée de la Tesla Model 3. Présentation soignée, gabarit européen et motorisation de 523 chevaux, la marque sort le grand jeu sur cette belle berline qui a l'audace de ne pas copier sur un autre constructeur. Le second modèle est l'Atto 3, un SUV électrique du très demandé segment C prêt à rouler en Europe. Son intérieur singulier avec l'écran central qui pivote de portrait à paysage selon vos envies ou son autonomie de 420 kilomètres pourront être à vous pour moins de 40 000 €, de quoi faire trembler certains généralistes. Enfin, la grande berline Han et le SUV 7 places Tang viennent compléter une gamme variée, prête à conquérir l'Europe. Honnêtement, ces nouveaux entrants sont pour moi très intéressants sur leur approche globale. J'ai passé pas mal de temps à tester les matériaux, éprouver les écrans et contempler le dessin si spécial qui a été tant bien que mal adapté pour le marché européen et je dois dire que je suis très surpris. Certaines choses manquent, tel que des tapis de sol ou la traduction française de l'infodivertissement, mais les finitions sont particulièrement soignées, les matériaux sont sympathiques au toucher et on sent une réelle volonté de soigner le produit.
Laissons à présent les constructeurs chinois pour aller vers un autre nouvel entrant, vietnamien cette fois-ci : Vinfast. Inauguré en grande pompe au Mondial 2018, le tout jeune constructeur a revu sa copie pour s'orienter vers l'électrique et laisser tomber les BMW rebadgées. Une usine construite, des talents débauchés de tous les constructeurs et quatre années plus tard, c'est une gamme de quatre modèles prêts à rouler qui est présentée et ils sont particulièrement réussis. Les VF6, 7, 8 et 9 sont des SUV électriques avec une forte volonté d'intégrer le marché européen en tant que constructeur premium. Signature lumineuse soignée, intérieur de qualité et technologie avancée sont autant d'atouts pour aller faire du tort aux allemands. Prenez le VF8 dans sa belle teinte vert anglais, son ambition est d'aller chercher les BMW iX3 et autres Audi Q4 avec une puissance de 358 à 408 chevaux. L'habitacle est soigné, légèrement triste mais reprend le concept de Tesla avec l'unique écran central. Prix de vente ? 46 050 € hors location des batteries, ou 62 200€ avec. Je peux vous assurer que cela va faire mal, d'autant plus que la marque met les moyens : le réseau de distribution sera en propre, avec un premier store sur Paris en fin d'année et tous les véhicules seront garantis 10 ans ou 200 000 kilomètres.
Pour terminer cette partie dédiée aux constructeurs étrangers, dirigeons-nous vers le stand de Crédit Agricole Consumer Finance qui présente le Fisker Ocean, un autre SUV électrique produit par Magna Steyr (Mercedes-Benz Classe G, Toyota Supra 2021). Henrik Fisker avait du travail en cette journée presse et le véhicule est resté inaccessible une très grande partie de la journée, les interviews se faisant à l'intérieur de celui-ci. Mais je peux vous dire que la voiture est superbe, le package soigné et la promesse intéressante : la Tesla Model Y a de quoi trembler. Pour près de 70 000 €, la version Ultra vous offrira 630 kilomètres d'autonomie dans un confort sans précédent avec 550 chevaux sous le pied droit, juste assez pour nos routes françaises. La version d'entrée de gamme, moins puissante, sera à vous pour 42 000€, soit un rapport équipements/prix assez fou. Je suis fan !
Et la passion automobile dans tout ça ?
Si je ne vous ai pas déjà perdus, c'est à ce moment que vous me dites "Mais où est passée la passion automobile avec tous ces SUV ?". Pour y répondre, le mondial a mis les petits plats dans les grands et a concocté une exposition de qualité en partenariat avec les youtubers Vilebrequin. On pouvait donc admirer sur leur stand une Pagani Huayra BC Roadster, une Mercedes-Benz SLR McLaren 722 Edition, une Porsche Carrera GT et le trio légendaire de voitures de rallye Lancia : Delta S4, 037 et Stratos. On se croirait presque à Rétromobile, mais le 1000tipla, projet communautaire de transformation d'un Fiat Multipla en bête de course, nous ramène cette démesure qu'on ne connaît que sur les salons !
Non loin de là, le Club Sport Auto Experience occupe un stand où se trouve une rare McLaren Senna LM, entre autres. Puis dans le hall 4, une collection d'une vingtaine de Ferrari attend les visiteurs contre 5€ reversés à une association caritative, permettant d'apprécier une LaFerrari et une Monza SP2 parmi les dernières créations de Maranello. La passion est toujours là je vous dis !
Au détour d'une allée, on trouve aussi une belle mise en scène avec la dernière Mustang Shelby, une moto de la série Gotham Knights ou encore une Lamborghini Sian Lego en taille réelle (le travail effectué est assez phénoménal).
Et c'est ainsi que se termine ce reportage sur le Mondial 2022. C'est toujours un plaisir de se rendre à un salon automobile, mais je dois avouer que le désintérêt le plus total des constructeurs vient entacher cette édition qui n'est pas la meilleure. Mercedes-Benz fait une exposition au musée Rodin en parallèle de l'événement, Rolls Royce présente la Spectre en ligne, BMW nous montre la nouvelle M2 au travers de youtubers mais aucun ne vient au salon, par peur de dépenser de l'argent futilement ? Alors quand Luca De Meo nous dit qu'il adore les salons et ne l'aurait manqué pour rien au monde, on vient à se demander qui a raison et qui a tort... Nous ne ferons pas de politique, mais la stratégie autophobe de la Mairie de Paris y est peut être aussi pour quelque chose. Bref, s'il y a une chose à retenir de ce mondial c'est que l'avenir n'est peut être pas qu'électrique (espoir sur l'hydrogène ?) et que de nouveaux entrants vont faire une entrée fracassante sur le marché européen. Alors chers constructeurs, il est temps de se réinventer avant de décliner et surtout, montrez-nous vos voitures !