Porsche 944 (1986) – Une québécoise à l'histoire peu commune.
Textes et photos par Théo Castel.
Au cours d'un long séjour professionnel au Canada, j'ai eu l'occasion de visiter la charmante petite ville de Rimouski, dans l'Est du Québec. A mille lieues du monde automobile, mon travail m'a pourtant fait croiser la route de cette superbe Porsche 944. Je me devais de lui rendre hommage.
À Rimouski, le fleuve Saint-Laurent est si large qu'on pourrait le prendre pour la mer. D'ailleurs, son eau est à moitié salée, rappelant que l'océan Atlantique n'est pas loin. Dans cette petite municipalité du Bas-Saint-Laurent, au milieu d'un trafic très américanisant, la 944 et son rouge façon Ferrari détonnent. Nous quittons le centre-ville en direction du site historique de la Pointe-au-Père.
Ce morceau de patrimoine maritime québécois offre un décors époustouflant. En cette fin de mois de mai, le soleil brille et la brise tiédit enfin. L'hiver rigoureux s'en est bel et bien allé.
La Pointe-au-Père concentre plusieurs attraits touristiques dont un phare classé. Construit en 1909, il est le deuxième plus haut du Canada ! Son sommet rouge rappelle notre monture et promet de jolies photos. Avec l'air iodé, on se croirait presque en Bretagne, pourtant située à 6000 kilomètres d'ici…
Notre auto fait partie de cette génération de Porsches décriées par les autoproclamés puristes à cause de leur moteur avant. Cette 944 est un modèle de 1986 équipé d'un sobre 4 cylindres développant 160 chevaux. S'il n'est pas un foudre de guerre, il permet néanmoins de cruiser tranquillement le long du fleuve. N'est-ce pas tout ce qu'on lui demande ?
Le panorama qui nous entoure n'est décidément pas banal. La Pointe-au-Père abrite les restes de l'Emperess of Ireland, un navire transatlantique ayant coulé en 1914. Mais surtout, on y trouve l'unique sous-marin musée du Canada, le NCSM Onondaga.
L'histoire de cette Porsche 944 débute à Toronto, mégapole anglophone de l'Ontario. Son futur propriétaire, Djanick, y fréquente alors un collectionneur porschiste qui lui transmet le virus. Au cours de ses recherches, il apprend qu'une 944 est à vendre dans une autre ville de la province, Kingston. Son propriétaire ne pouvait plus la conduire, la faute à des lombaires capricieux…Djanick saute sur l'occasion, d'autant plus que le prix demandé est très raisonnable. Le propriétaire commande même une housse et des tapis de sols neufs auprès de l'usine à Stuttgart !
Malgré ses 150 000km, la 944 est en excellent état, notamment à l'intérieur où le cuir des sièges n'a pas bougé. Seule la peinture a été ternie par les années. Après l'avoir démontée, nettoyée pièce par pièce et remontée entièrement, Djanick décide de lui donner une seconde jeunesse avec une peinture neuve. Il lui vient alors l'idée de faire de cette restauration un projet utile et collectif. La Porsche est proposée au Centre de Formation Professionnelle de Rimouski-Neigette comme projet pour deux étudiants en carrosserie. Le défi est de taille : il s'agit d'aboutir à un rendu "usine" d'époque, ce qui nécessite de longues séances de polissage.
Après 60 heures de travail s'étalant sur un semestre, la 944 ressort de l'école comme neuve. Un beau travail de la part des deux étudiants que Djanick a voulu honorer en créant une bourse "Travail d'équipe". Depuis 2014, il remet celle-ci aux élèves ayant travaillé ensemble sur des projets de carrosserie. Voilà une bien belle manière d'unir passion automobile et travail scolaire !
Le soleil se couche sur le boulevard Saint-Germain. Les jours s'allongent et les premières terrasses s'installent dans la soirée québécoise. Tandis que nous nous réunissons autour d'une bière, la 944 se repose à l'ombre. La vie est paisible à Rimouski…
Un grand merci à Djanick Michaud pour avoir pris le temps d'organiser cette séance photo sur ses belles terres. Je remercie également mon député Guy Caron pour cette fabuleuse semaine au Bas-Saint-Laurent.